Skip to content
Recherche

Pleins feux sur: Hawa B

Avec «better sad than sorry», l’artiste repense et actualise le jazz, à sa façon.

Pleins feux sur: Hawa B
Laurence B (Doux Vacarme)

Mélanger le jazz, le R&B et la pop pour créer un son authentique et novateur… Je tombe sur une douzaine d’artistes par mois qui insistent qu’ils le font de manière révolutionnaire. Ce n’est malheureusement que trop rarement le cas.

C’est pourquoi better sad than sorry, le premier album studio de Hawa B, se distingue du lot. Entièrement écrit et composé par Hawa elle-même, le projet vient confirmer sa place en tant qu’artiste solo. Après deux premier EPs bien reçus et qui ont mis la table pour sa néo-soul bien particulière, sa vision devient claire sur better sad than sorry: se défaire des codes, mais prouver qu’on les maîtrise.


Dès ses débuts, Hawa B, alias Nadia Hawa Baldé, a su se faire remarquer comme choriste dans la scène indépendante, ayant chanté aux côtés d’Hubert Lenoir, de Charlotte Cardin ou encore de FouKi. Assez jeune, elle se découvre une passion pour la musique et un talent pour le piano, qui la mènera à étudier en musique jazz, à l’Université de Montréal. Parallèlement, elle côtoie des musiciens qui l’amèneront à devenir choriste et arrangeuse musicale pour des artistes plus établis. «J’aime être choriste, mais c’est très différent comme métier que d’être une artiste solo, explique Hawa B. Il n’y a pas un des métiers qui est plus facile ou difficile que l’autre, mais ça demande une attention et des skills différents.»

Dès les premières notes de better sad than sorry, on sent que l’on entre dans un univers dense et riche, parfois sombre et menaçant, comme si l’on avancait dans la jungle dans le noir, guidé par quelques étoiles et la fumée d’un feu de camp au loin. Le storyboard avait été dessiné avec ses deux premiers EPs, sad in a good way et sadder but better, ce dernier se retrouvant en entier dans l’album, mais on comprend instantanément que l’univers est ici complet: on ne peut que se laisser envoûter.

«J’espère que ça sera plus clair ce que je fais, dans la tête des gens, avec cet album-là», dit Hawa B en riant. «C’est sûr que ma musique est nichée, mais pas assez jazz pour que j’ai un public de jazz. J’espère trouver ma niche, je me souhaite de nouveaux weirdos!»

Laurence B (Doux Vacarme)

Il est vrai qu’il est compliqué de mettre le doigt sur où la ligne se brouille entre les styles, quand on écoute Hawa B. Quand on parle de ‘jazz’, on a une certaine vision en tête, et elle est souvent nostalgique. Mais la musique, comme la langue et la société, c’est fluide et élastique, ça change avec le temps, parce que les temps changent. Personne ne pourrait affirmer que The Weeknd ne fait pas du R&B; ce n’est simplement pas le même genre de R&B que celui de Ray Charles ou d’Aretha Franklin.

«J’ai un besoin que les choses soient nouvelles. J’aime la ‘vieille’ musique. Je l’ai étudiée, j’ai fait pleins de shows corporatifs où je devais faire des reprises de vieilles chansons. C’est peut-être ce qui fait que j’ai pas envie que ma musique ait ce côté nostalgique», explique Hawa B. «Je trouve plate que l’industrie du jazz soit aussi nostalgique, parce que ce n’est pas l’esprit du jazz. C’était censé être de la pop dansante, puis c’est devenu un genre qui poussait l’expérimentation plus loin, quand le free jazz s'est imposé.»

Dans ce sens, ce que fait Hawa B, c’est du jazz. Mieux encore, de par sa volonté de constamment repousser les limites de sa musique (et les siennes), de toujours chercher la nouveauté, on pourrait arguer qu’elle est plus jazz, au sens originel du terme, que les artistes jazz en complets qui se prennent très au sérieux dans des cadres guindés. C’est simplement qu’elle est plus Alice Coltrane que, disons, Norah Jones.

«C’est pas que ce que je fais n’est pas du jazz, c’est que nos références sont désuètes.»

Dans Follow, Hawa B se révèle tour à tour provocante et insaisissable, invitant l’auditeur à la suivre dans son univers où elle oscille entre séduction et défi. Elle incarne une figure à la fois fascinante et imprévisible, qui embrasse pleinement ses zones d’ombre. Cette dualité se poursuit dans Forget, où elle explore l’évasion par le biais de substances pour oublier la culpabilité et le désir. Au fil des chansons, elle met en musique la dualité entre le désir d’un plaisir immédiat et la charge émotionnelle qui pourrait en découler.

Avec Better Sad Than Sorry, elle revendique la tristesse comme une source de force personnelle, préférant vivre à fond sa tristesse plutôt que de feindre une fausse sérénité. Ce refus des masques se retrouve dans Show, où elle expose la fragilité des identités façonnées par les regards extérieurs. Silence traduit l’épuisement face aux émotions refoulées, sa lutte pour se libérer de cette pression résonnant dans chaque refrain comme un appel à relâcher ce qui pèse.

- YouTubewww.youtube.com

Avec better sad than sorry, Hawa B tisse un univers sonore feutré, exubérant et conçu pour une soirée d’hiver, ou un retour contemplatif à pied après une soirée arrosée. Sa musique devient le compagnon idéal de moments introspectifs, toujours à deux doigts d’une décision qu’on pourrait regretter.

Dans son ensemble, better sad than sorry nous présente une Hawa B plus assurée, prête à affirmer sa vision artistique. Cette évolution se ressent dans les arrangements soignés et l’attention aux détails dans le mix qui rendent l’écoute d’autant plus immersive. Félix Petit, producteur bien connu de la scène indie-rock québécoise, y apporte son expertise, mais c’est surtout Hawa B, en tant que principale productrice et co-réalisatrice, qui insuffle à chaque morceau une identité forte. «Souvent, j’arrive avec des démos instrumentales pas mal complètes. La force de Félix c’est de faire que mes idées sortent bien», explique-t-elle, admettant que son expérience en tant que cheffe d’orchestre et qu’enseignante en musique fait qu’elle a le lexique et les réflexes pour concrétiser ses idées.

Par un hasard tout sauf triste, Hawa B présentera better sad than sorry sur scène pour la première fois le 29 novembre à la Sotterranea, dans le cadre du Festival Triste.

Plus de nouvelles

«Beatles ’64»: Quand la Beatlemania a frappé l'Amérique

«Beatles ’64»: Quand la Beatlemania a frappé l'Amérique

Ceci est la traduction adaptée d’un article de Daniel Kreps, originalement publié par Rolling Stone le 14 novembre 2024. Nous republions l'article originalement intitulé 'Beatles '64' : Beatlemania Hits America in New Trailer for Disney+ Documentary avec la permission de son auteur. Notez que certaines subtilités et nuances peuvent différer de la version originale.

La période où la Beatlemania a atteint l'Amérique du Nord pour la première fois est immortalisée dans un nouveau documentaire de Disney+ produit par Martin Scorsese.

Keep ReadingShow less
Linkin Park annonce une tournée mondiale
Joern Pollex/Redferns

Linkin Park annonce une tournée mondiale

Ceci est la traduction adaptée d’un article de Daniel Kreps, originalement publié par Rolling Stone le 14 novembre 2024. Nous republions l'article originalement intitulé Linkin Park Announce 2025 ‘From Zero’ World Tour Dates avec la permission de son auteur. Notez que certaines subtilités et nuances peuvent différer de la version originale.

Fraîchement réunis, Linkin Park annoncent une tournée en 2025 pour promouvoir leur nouvel album, From Zero, qui sort demain 15 novembre.

Keep ReadingShow less
Tom Morello compare Post Malone à Chris Cornell

Post Malone

Tom Morello compare Post Malone à Chris Cornell

Ceci est la traduction adaptée d’un article de Kalia Richardson, originalement publié par Rolling Stone le 12 novembre 2024. Nous republions l'article originalement intitulé Tom Morello Says Post Malone Writes Like Chris Cornell: 'Hooky, Beautiful, Terrifying' avec la permission de son autrice. Notez que certaines subtilités et nuances peuvent différer de la version originale.

Ces dernières années, Post Malone a collaboré avec tout le monde, de la légende de la musique country Dolly Parton aux stars de la pop comme Doja Cat et Taylor Swift. L'interprète de Congratulations n'a pas cessé de franchir les frontières des genres et a même créé un morceau inachevé avec Tom Morello.

Keep ReadingShow less
Noel Gallagher va sortir une version de six heures de «Champagne Supernova»

Noel Gallagher

Wiki Commons

Noel Gallagher va sortir une version de six heures de «Champagne Supernova»

Ceci est la traduction adaptée d’un article d'Emily Zemler, originalement publié par Rolling Stone le 12 novembre 2024. Nous republions l'article originalement intitulé Noel Gallagher to Unveil Six-Hour Version of Oasis 'Champagne Supernova' avec la permission de son auteur. Notez que certaines subtilités et nuances peuvent différer de la version originale.

Noel Gallagher a créé une nouvelle version du succès d'Oasis de 1995, Champagne Supernova. Cette version de six heures, en mode «ambient mixé», sera diffusée à la National Portrait Gallery de Londres dans le cadre de l'exposition à venir Zoë Law: Legends, qui présente un portrait de Gallagher.

Keep ReadingShow less
Joe Rocca invite ses Dead Obies sur «Told Ya»
Vincent Gravel

Joe Rocca invite ses Dead Obies sur «Told Ya»

À quelques jours de son spectacle de lancement au Ausgang Plaza, Joe Rocca présente un nouveau vidéoclip pour la chanson Told Ya, tirée de son album Hybride. Ce clip marque la première apparition conjointe des membres de Dead Obies depuis plusieurs années, un choix qui met en avant la dynamique et l’héritage du groupe.

Réalisé par Vincent Gravel, le clip adopte une esthétique minimaliste. Tourné dans des décors urbains au style brut, il met l’accent sur les interactions entre Joe Rocca, Greg Beaudin, 20Some et Ogee Rodman. Les plans serrés et l’esthétique minimaliste servent à souligner l’intensité des échanges de rimes et la cohésion des membres, sans artifice.

Keep ReadingShow less