Aucune voix n’arrive à la cheville de celle de notre diva nationale, Céline Dion. Mais sept des plus belles voix du Québec peuvent, ensemble, aspirer à y parvenir. C’est ce qu’ont fait Brigitte Boisjoli, Lou-Adriane Cassidy, Safia Nolin, Marie-Denise Pelletier, Rita Baga, Ariane Roy et Martine St-Clair dimanche soir à la salle Wilfrid-Pelletier dans le cadre des Francos de Montréal.
Comme son titre (peu original) l’indique, le spectacle D’eux, 30 ans déjà : Célébrons Céline! rend hommage aux chansons intemporelles de D’eux, cet album culte de Céline Dion paru en 1995. S’étant écoulé à près de 10 millions d’exemplaires, il demeure à ce jour l’album francophone le plus vendu au monde. Et pour cause : il s’agit d’un diamant dans le vaste répertoire de l’icône de Charlemagne. D’eux, c’est la rencontre au sommet entre le talent exceptionnel d’auteur-compositeur de Jean-Jacques Goldman et celui inégalé d’interprète de Céline Dion. Un mariage artistique béni des dieux qui crée encore aujourd’hui des étincelles.
Le spectacle qui en a été tiré fait la démonstration éloquente que ces classiques indémodables de la chanson francophone n’ont pas pris une ride 30 ans après leur sortie. Dimanche soir, on a eu droit à un nombre incalculable de frissons et de prouesses vocales, pour le plus grand plaisir des spectateurs, qui ne se sont pas fait prier pour chanter et danser debout devant leurs sièges.
Cet hommage orchestré avec précision par Alex McMachon n’a pas été conçu pour réarranger ou mettre au goût du jour cet album incontournable de Céline Dion, il a plutôt été monté dans le but d’offrir aux admirateurs de la chanteuse des relectures fidèles de ses chansons originales, dont Pour que tu m’aimes encore, Je sais pas et Destin. C’est consensuel, certes, mais diablement efficace. Pourquoi changer une formule gagnante?
Toutes de noir vêtues, les sept interprètes se sont succédées au micro, chantant la plupart du temps en solo, mais aussi parfois en duo ou en trio. Sur la scène étagée munie d’une passerelle centrale, elles étaient entourées de quatre choristes et de neuf musiciens, dont il faut saluer le talent et la vitalité. Durant les 90 minutes de la performance, un bel équilibre a été maintenu entre moments survoltés et chants intimistes. Entre chaque pièce, des extraits audios d’entrevues accordées à l’époque par Céline Dion et ses collaborateurs donnent un peu de contexte sur la création de D’eux.
Brigitte Boisjoli
Parmi les moments de forte intensité, citons la performance à «100 000 volts», comme l’a qualifiée Marie-Denise Pelletier, de Regarde-moi par Brigitte Boisjoli, dont la voix d’une puissance inouïe ressemble par moments à s’y méprendre à celle de Céline Dion. Dans un registre plus doux, Boisjoli a aussi été particulièrement émouvante en interprétant La mémoire d'Abraham, chanson qu’elle a dédiée à son père, qui est aux soins palliatifs, et qui lui a valu une ovation.
Des ovations, il y en a eu pratiquement à la fin de chaque chanson. C’était particulièrement mérité pour l’ultra dynamique interprétation de J’irai où tu iras par Martine St-Clair et Marie-Denise Pelletier accompagnées – surprise! – de Louis-Jean Cormier, reprenant la partie de Goldman. Ces deux grandes chanteuses ont du coffre, c’est le moins qu’on puisse dire, et elles l’ont chacune démontré à plusieurs reprises au cours de la soirée.
Dans une facture plus intimiste, Safia Nolin a offert un moment de grâce lors de sa livraison sentie de S’il suffisait d’aimer, qu’elle a dédiée à la Palestine. (Pour monter un spectacle de 90 minutes, les interprètes ont débordé de l’album D’eux.) Sa voix déchirante se prête à merveille à cette chanson, durant laquelle les spectateurs ont fait brandir les lumières de leurs téléphones. Magistral.
Safia Nolin
Et que dire de Lou-Adriane Cassidy qui, au lendemain de son triomphe sur la grande scène extérieure des Francos samedi, a livré avec sa fougue légendaire de formidables interprétations de Tout l’or des hommes et du classique suprême, Pour que tu m’aimes encore.
S’il y en avait pour se demander ce que pouvait bien faire Rita Baga aux côtés de ces grandes voix du Québec, l’alter ego de Jean-François Guevremont a prouvé qu’elle méritait sa place en livrant avec une énergie et une exubérance dont seules les drag queens sont capables la dansante Dans un autre monde.
Si l’interprétation de Destin d’Ariane Roy nous a un peu laissée sur notre faim – malgré des solos de guitare enlevants –, la chanteuse qui a fait paraître l'album Dogue cette année s’en est très bien tirée avec Les derniers seront les premiers.
Filant à la vitesse de l’éclair, le spectacle s’est conclu avec L’amour existe encore, chantée à sept voix. «Avec tout ce qui se passe dans le monde, cette chanson peut apporter un peu de réconfort», a mentionné Marie-Denise Pelletier en guise de préambule. C’est exactement ce qu’a procuré ce spectacle, qui sera présenté à nouveau le 13 juillet au Festival d’été de Québec.